Pour la mémoire et le souvenir, il serait nécessaire de revenir sur la naissance du RDR, afin de donner à l’histoire toute sa quintessence et surtout, pour les nouvelles générations, une béquille pour leur culture et formation politique.

Au soir du 7 décembre 1993, l’histoire de la Côte d’Ivoire passe à une double vitesse et connaît une accélération. Si la question de la succession à la Présidence de la République semble avoir trouvé une issue heureuse grâce à la maturité du peuple ivoirien et au bon sens de l’ex-Premier Ministre Alassane Ouattara, en revanche, celle de la vacance de la présidence à la tête du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) demeure un mystère entretenu.
Alors que (selon les dispositions statutaires), la succession à la présidence du PDCI devait se faire à la suite d’une élection régulière et démocratique dans le cadre d’un congrès extraordinaire, les instances dirigeantes du PDCI restent muettes sur cette question. Motus et bouche cousue. Le Secrétaire Général d’alors, un certain Laurent Dona Fologo, reste muet comme une carpe. Un malaise général s’installa aussi bien au sommet qu’à la base du PDCI-RDA.

Djeny Kobina, alors membre du Comité central et chef de file du mouvement de la rénovation (un courant de pensée à l’intérieur du PDCI), interpella les instances du PDCI sur la nécessité de la tenue d’un congrès extraordinaire ; un congrès nécessaire pour donner un souffle nouveau au vieux parti.

Djeny Kobina multiplie ses prises de position et fait des déclarations dans la presse en prenant l’opinion à témoin. Sous la pression, le PDCI lâche du lest.

Le 30 avril 1994, se tient le congrès extraordinaire. Un congrès qui a fait fi des statuts et règlements intérieurs du PDCI. Il s’est tenu en excluant toutes procédures démocratiques qui exigent une élection régulière à la présidence. Les dés étaient déjà jetés. C’est plutôt à un congrès “prêt-à-porter” que l’on assista. Les militants n’ont pas eu droit à la parole. Une seule candidature, celle de Henri Konan Bédié, est enregistrée pour la présidence du Parti.

Coup de théâtre, une main “inconnue” se lève au fond de la salle du Palais des Congrès de l’Hôtel Ivoire et insiste pour prendre la parole. Objectif : mettre fin à la pensée unique et faire entendre la position du courant politique des rénovateurs qu’il dirige au sein du PDCI. Cette main est celle de Djeny Kobina. Mais cette main-là sera, hélas, noyée par les clameurs délibérément orchestrées et entretenues par une cohorte de loubards commis à la besogne d’empêcher toute intervention et tout autre son de cloche que celui composé par la direction du parti.

L’atmosphère est électrique et délétère. C’est dans cette ambiance “uni-sonore” et monocorde qu’Aimé Henri Konan Bédié est proclamé Président du PDCI-RDA. Vinum bibi trahatur : “Le vin était ainsi tiré, il fallait le boire”. Mais Djeny Kobina et ses camarades n’accepteront pas de boire un vin mal distillé, selon eux. La rupture avec le PDCI est inévitable et sera vite consommée. Tous les militants du PDCI-RDA épris de justice sont frustrés par ce manquement grave à la pratique démocratique universelle.

Nombreux sont ceux, parmi les militants et sympathisants du PDCI, et même des citoyens lambda, qui n’ont pas compris pourquoi, à ce congrès du PDCI, aucun mot de gratitude et de reconnaissance n’a été exprimé par la direction du parti à l’endroit de l’ex-Premier Ministre Alassane Ouattara, qui venait pourtant d’accomplir, durant trois ans, un travail immense pour sortir le pays du creux de la vague et sauver le pouvoir chancelant de Félix Houphouët-Boigny.

Au lendemain de ce congrès, le PDCI est confronté à une crise sans précédent. On assiste à des défections en masse dans ses rangs. Tous ceux qui veulent sauvegarder les valeurs républicaines rejoignent Djeny Kobina, alors traité par le Secrétaire Général Dona Fologo de “loup solitaire perdu dans le désert.”

La suite, on la connaît. Les statuts du Rassemblement des Républicains (RDR) sont déposés au Ministère de l’Intérieur. Trois mois plus tard, soit le 27 septembre 1994, conformément à la loi, le RDR devient une réalité vivante et vivace en Côte d’Ivoire.

SOUMAHORO Alfa Yaya

Ce texte officiel se trouve sur la première plaquette éditée et imprimée par le Rassemblement des Républicains en 1994.

 

 

Depuis le 27 septembre 1994, la scission officialisée entre le PDCI-RDR et le RDR. Un tournant majeur s’inscrit dans l’histoire politique de la Côte d’Ivoire : les héritiers de Félix Houphouët-Boigny, se regardent désormais en chien de faience. Des tensions larvées, de divergences idéologiques, de luttes d’influence et de mémoires conflictuelles autour de l’héritage houphouëtiste mettent en péril l’héritage du père fondateur de la Cote d’Ivoire moderne.

Les années qui suivent sont ainsi marquées par des querelles internes, des coups bas, des rivalités personnelles et des ambitions politiques divergentes. Des alliances fragiles se forment puis se rompent.

Le bilan de ces décennies de division est lourd : une démocratie affaiblie, une unité compromise, un peuple divisé et une jeunesse en quête d’identité politique. Pire, le pouvoir d’État échappe aux héritiers.

Il devient alors urgent, pour les héritiers de taire leurs querelles politiques, de revenir aux sources véritables de l’houphouëtisme — celles du dialogue sincère, de la recherche du consensus, de la primauté de l’intérêt général sur les intérêts individuels ou corporatistes. Car si le passé a été marqué par des années de braise, il appartient aujourd’hui aux nouvelles générations de souffler sur les braises pour faire renaître la flamme de l’unité, de la paix et de la solidarité, seules capables d’éclairer l’avenir de la Côte d’Ivoire.

 

L’ACTE DE NAISSANCE DU RHDP

Les leaders du Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix ont signé, le 10 avril 2005, un accord politique pour la création d’un nouveau parti en Côte d’Ivoire dénommé RHDP. C’est un acte qui traduit la volonté des signataires de consolider leurs acquis et surtout de pérenniser les actions du Président Houphouët-Boigny.

Le parti unifié devient une réalité au Rassemblement des Houphouëtistes pour la Paix et la Démocratie (RHDP). Après la signature de la plateforme, le 18 mai 2005 à Paris, la coalition s’est consolidée au fil du temps avec la conquête et l’exercice du pouvoir d’Etat. Les acquis sont nombreux et les leaders du RHDP ont décidé de passer à une étape supérieure de leur alliance, celle de l’unification. D’où la signature, le mardi 10 avril 2018, de l’Accord Politique portant création du parti unifié dénommé « Le Rassemble-ment des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP)». Le document a été signé par le Président de la République, Son Excellent Monsieur Alassane Ouattara, Président d’Honneur du Rdr et les Présidents du Pdci-Rda, de l’Udpci, du Mfa, du Pit et de l’Upci. A travers cet acte, les leaders du RHDP écrivent une nouvelle page de l’histoire de la Côte d’Ivoire. En effet, la création du parti unifié est considérée à juste titre par certaines personnes de la sphère politique ivoirienne comme une « Nouvelle chance » ou une « Chance historique » pour notre pays. Tout simplement parce que l’accord politique du 10 avril dernier traduit solennellement la volonté des signataires de poursuivre l’œuvre de développement et l’action politique de Félix Houphouët-Boigny, premier Président de la Côte d’Ivoire moderne.

Pour mémoire, disons que le Père de la nation ivoirienne, en militant au parti communiste et en créant avec certaines personnalités de l’époque le RDA et le Syndicat Agricole Africain, a défendu des valeurs importantes qui, aujourd’hui, constituent les principes fondateurs ou la philosophie de l’houphouëtisme. Il s’agit de la lutte pour une société plus juste qui explique son combat contre la domination coloniale et l’exploitation des producteurs agricoles africains. Le combat politique de l’ancien Président ivoirien a également porté sur une société de liberté : « Le RDA est une union constituée sur un programme minimum pour la lutte contre la domination coloniale des Africains. Sa mission est de créer les conditions du rassemblement de toutes les forces anticolonialistes à l’intérieur de chaque colonie en vue de mener le combat pour la liberté », selon le Pr. Lémassou Fofana, enseignant-chercheur à l’institut d’Histoire, d’Arts et d’Archéologie de l’Université Félix Houphouët Boigny.

Enfin, l’houphëtisme repose foncièrement sur un idéal, celui d’une société de progrès économique et social. « Pour Félix Houphouët-Boigny, l’objectif fondamental de son combat est la recherche permanente du bien-être de l’homme, de la lutte contre les misères, du progrès au service de la société ». C’est pourquoi, a expliqué l’historien ivoirien, il a eu besoin « d’un nouveau contrat social qui rassemble toutes les énergies, toutes les intelligences, toutes les forces sociales pour construire la belle Côte d’Ivoire que nous avons connue jusqu’au coup d’Etat de 1999 et qui depuis 2011 a repris le chemin du développement économique et social ».

Le Président Alassane Ouattara s’inscrit totalement dans la vision de son illustre prédécesseur, lui qui a exprimé clairement son ambition de faire de la Côte d’Ivoire, un pays émergent à l’horizon 2020.
Pour réussir cette mission, le RDR et ses alliés ont besoin d’un nouveau contrat social et politique. L’ accord politique pour la création du parti unifié signé le 10 avril dernier est un engagement qui va au-delà d’une simple volonté de s’unir. Les termes sont sans ambigüité. Il s’agit bel et bien de la création d’un nouveau parti politique « pour ensemble dans l’union retrouvée, servir et continuer de bâtir la Côte d’Ivoire, en lui permettant de renouer avec la stabilité poli-tique, la paix sociale et le développement économique en vue de l’épanouissement du peuple ivoirien et des générations futures ». Il donne véritablement un fondement juridique au parti unifié dont les bases, comme les pièces d’un puzzle, se mettent en place progressivement. Ainsi, l’un des maillons essentiels de cette organisation est sa dénomination : « Le parti politique unifié s’appellera « le Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix – RHDP », pour, assurément, rester fidèle à la ligne originelle de l’Houphouëtisme.

L’Accord politique appelle donc à la responsabilité des signataires. Chacun à son niveau doit jouer sa partition pour permettre au RHDP unifié de garder le pouvoir le plus longtemps possible et continuer de donner l’exemple d’une formation politique solide en Afrique et partout dans le monde. Pour ce faire : « les partis membres qui adhèrent à cet ACCORD POLITIQUE s’engagent à prendre toutes les dispositions utiles et souveraine pour assurer la réussite de cette grande ambition. Ils s’engagent également à conduire la démocratie et toutes les élections à venir en RHDP dans un esprit de solidarité, de sérénité, de non-violence et de transparence ».

Le dernier point tout aussi important que les autres est la confiance. Elle se mérite. Un accord, qu’il soit politique ou non, est basé sur la confiance et la bonne foi. Pour ce qui concerne l’accord politique signé récemment, les signatures apposées au bas du document engagent personnellement les leaders poli-tiques du RHDP et rappellent fermement qu’ils assument leurs responsabilités devant l’histoire. L’histoire que chacun écrira dans l’intérêt supérieur de la Côte d’Ivoire rassemblée, unie et prospère.

Bernadette BAH

 

 

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